Datation U-Th-Pb par microsonde électronique et ID-TIMS de monazites extraites par micro-forage sur lame mince: application aux granulites de UHT du Centre-Nord Madagascar.

Philippe Goncalves, Jean-Louis Paquette, Christian Nicollet et Bertrand Devouard

Laboratoire Magmas et Volcans, Université Blaise Pascal-CNRS
5, rue Kessler - 63 038 Clermont-Ferrand

Notre étude sur des monazites de granulites du Centre-Nord Madagascar, combine une analyse isotopique par ID-TIMS sur grains individuels extraits par micro-forage sur lame mince et une caractérisation au préalable à la microsonde électronique (imagerie, datation U-Th-Pb,…). Un des aspects fondamentaux est que la position texturale de chaque grain daté est connue, permettant de relier âges et conditions métamorphiques.

L'échantillon est une granulite qui se compose d'un assemblage de UHT à grt-opx-sil-qtz (~11 kbar, 1000°C) partiellement rétromorphosé en un assemblage hydraté à orthoamphibole, cordiérite ± biotite (~6-7 kbar, 850°C).

Trois populations de monazite ont été extraites en fonction de leur position texturale: (1) monazites en inclusion dans les grenats; (2) monazites dans la matrice composée de quartz; (3) monazites localisées dans les couronnes réactionnelles hydratées. Tous les points analytiques sont variablement discordants, formant un alignement qui permet de définir des intercepts avec la concordia à 2523 ± 10 Ma et 576 ± 12 Ma. Le taux de discordance est fonction de la position texturale.

Les inclusions dans les grenats sont les moins discordantes (~30 %). L'âge maximum de 2478 ± 88 Ma obtenu à la microsonde sur des monazites automorphes à l'équilibre avec le grenat est en accord avec l'intercept supérieur. Cet âge est intreprété comme celui du métamorphisme de UHT. Les monazites localisées dans les quartz montrent une discordance très variable (15-95 %). Certains grains préservent des âges U-Th-Pb fini-archéens cohérents avec les âges obtenus précédement. Un âge significativement plus anciens (U-Th-Pbmax = 2696 ± 90 Ma; 207Pb/206Pb ~ 2650 Ma) a été obtenu sur un grain peu discordant. Nous interprétons cette monazite individuelle comme le témoin d'un événement, probablement magmatique, à ~2.7 Ga.

Les monazites associées aux textures réactionnelles sont les plus discordantes (70-95 %). Elles se composent d'un cœur hérité, équivalant aux monazites fini-archéennes partiellement remises à zéro. La présence d'inclusions d'orthoamphiboles, cordiérite, biotite dans une bordure néoformée par dissolution-précipitation, suggère une cristallisation contemporaine de la rétromorphose hydratée à ~730 Ma.

Les monazites de la matrice montrent systématiquement des surcroissances caractérisées par une composition chimique bien distincte. Les données U-Th-Pb permettent de les dater à 500-530 Ma. Cette nouvelle génération résulterait d'une circulation de fluide tardive. L'alignement imparfait des points analytiques prés de l'intercept inférieur à 576 Ma résulte probablement de la superposition des événements à 730 et 530-500 Ma.

L'utilisation de l'analyse ponctuelle à la microsonde électronique et de l' ID-TIMS permet de combiner une haute résolution spatiale et temporelle. Cette approche complémentaire a permis de révéler des variations d'âges importantes à l'échelle cristalline et de la lame mince où quatres événements ont été identifiés. Par rapport aux approches conventionnelles où le choix des fractions de grains à analyser se fait en fonction de leur morphologie, notre technique permet d'avoir un contrôle pétrographique. Ceci a permis de mettre en évidence le diachronisme entre le métamorphisme de UHT et la rétromorphose hydratée. L'importante discordance des monazites associées à l'hydratation suggère un rôle fondamental des fluides et de leur composition sur les processus de remise à zéro.

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